La préface
A 16 ans, j'ai joué "Les Fleurs du Mal", de Baudelaire. La Charogne, pour être précise. A 17 ans, c'était "Le Prophète", de Kalil Gibran. La personne qui m'a portée sur les planches et qui a rempli ma bouche et mon coeur de ces mots exceptionnels, c'est Dominique Jacques, mon professeur de français. Une femme-amazone qui n'a peur de rien, une écrivaine, une comédienne, une dompteuse d'adolescents rebelles... C'est à elle que j'ai demandé, quinze ans plus tard, de lire le manuscrit de mon deuxième bouquin et d'écrire ma préface. Par bonheur, elle a accepté. Et m'a fait pleurer. Ma gratitude est infinie...
"Notre vie humaine est un voyage et chaque pierre, chaque oiseau, chaque être, lui donne sa lumière. Quand Elodie fut mise sur mon chemin, j'étais prof de français (je le suis toujours ,certains comportements ont la vie dure).Je me rappelle de son premier récit, elle avait quinze ans , et j'avais demandé à mes élèves d'imaginer leur allégorie de la vie. Celle d'Elodie racontait l'histoire d'une barque voguant sur des eaux tantôt calmes et tantôt déchaînées , qui la menaient finalement à l'éblouissement des pyramides. C'est cette lumière-là, la lumière particulière d'Elodie , qui brûlait déjà le papier. Car pour Elodie la nomade, la vie est un voyage, le trésor dort à chaque coin des jours, et nous sommes là pour le réveiller. Dans ses « Chroniques du Triangle d'or », elle nous convie à redécouvrir la joie simple d'être là, entièrement, à chaque seconde, dans l'ouverture au monde. La joie de tout prendre, parce que tout nous apprend quelque chose, même et surtout ce que nous pensons inintéressant, ennuyeux, éloigné de ce que nous appelons notre but. Elodie nous remet en contact, par son extraordinaire vitalité , avec la magie d'être nous, et c'est bien là notre plus grande richesse, même si notre société consumériste veut nous forcer à penser le contraire. Elle nous rappelle que chaque être est extraordinaire et la force que dégagent ses écrits réanime notre propre flamme, si souvent menacée d'extinction. Elle nous redit, avec les grands sages, que la vérité n'est nulle part sinon en nous et que nous sommes, chacun, responsables de notre destin. En ces temps d'abattement, de crises, ces chroniques sont un baume composé d'humour, de tendresse, d'énergie .Elles nous murmurent que les épreuves de l'existence sont un formidable moyen de se connaître et de s'éveiller à qui nous sommes. Elles nous plongent dans un bain de couleurs, de sons, de parfums, et nous nous prenons à penser que notre vie devrait être ça, une plongée sans peur dans les sons, les couleurs et les parfums, alors que nous vivons trop souvent le nez , les oreilles, les yeux et le coeur fermés.
Elodie se trouve à nouveau sur mon chemin. La vie me l'a renvoyée comme un boomerang. Ainsi va la vie, la vie malicieuse qui fait de nous, tour à tour ,ceux qui enseignent et ceux qui apprennent. Et peu importent les âges, et ce que nous appelons notre fonction, notre état. L'éducateur n'est pas toujours celui qu'on croit. Les essences se croisent et qu'elles se manifestent dans de jeunes enveloppes ne doit pas nous tromper sur leur sagesse. De vieilles âmes prennent la forme de jeunes gens aux yeux pétillants et aux cheveux clairs. Ou de chatons joueurs. Ou de mendiants. Le roi est rarement celui qui se dit roi.
S'abreuver à ces chroniques, c'est s'immerger dans un bain de jouvence. Elles nous invitent à cultiver la joie, à ne pas perdre notre énergie précieuse dans l'angoisse et dans la peur. Comme le vieil homme de la fable chinoise que raconte Elodie,reprenons contact avec la simplicité des gestes où l'âme est unie au corps. Dans un monde où la vitesse est le maître-mot, rappelons-nous ces paroles d'Indiens d'Amérique égarés dans une métropole européenne: « Vous allez vite , vous courez, mais pour aller où? ».Redonnons du goût à l'eau comme le vieil homme de la fable qui refuse d'utiliser les engins mécanisés pour puiser l'eau de son puits. Redécouvrons les pouvoirs du coeur, pour ne pas finir desséchés.
C'est avec l'encre du coeur que ces textes ont été écrits. Puissent ceux qui les boiront en ressentir les bienfaits .Longtemps."